Prévention et traitement des escarres

Définition

L’escarre est une lésion cutanée d’origine ischémique liée à une compression des tissus mous entre un plan dur et les saillies osseuses.

Il existe trois types d’escarres selon la situation :

  • L’escarre « accidentelle » liée à un trouble temporaire de la mobilité et/ou de la conscience
  • L’escarre « neurologique », conséquence d’une pathologie chronique motrice et/ou sensitive
  • L’escarre « pluri-factorielle » du sujet poly-pathologique, confiné au lit et/ou au fauteuil

L’escarre entraîne  principalement douleur et infection. Elle peut générer chez le patient une altération de son image corporelle.

Prévalence et incidence

En France, la prévalence moyenne de l’escarre chez les patients hospitalisés est de 8.6%.  (prévalence : nombre de patients porteurs d’escarre un jour donné).

L’incidence est de 4.3%   (incidence : proportion de patients développant une escarre au cours de leur séjour).

L’âge moyen des porteurs d’escarre est de 74 ans.

Chez les blessés médullaires à la phase aiguë, 30% présentent des escarres lors de leur admission en service de rééducation, retardant ainsi de 3 mois en moyenne le processus de rééducation.

Plus de 85% des patients développent au moins une escarre durant leur vie.

Les principales localisations des escarres

Je vous en ai déjà parlé dans un post précédent mais je vous en reparle de nouveau ici en rentrant un peu plus dans les détails.

40% des escarres siègent au sacrum et 40% aux talons, ce sont donc les principales localisations des escarres.

  • L’escarre sacrée : apparaît principalement chez les patients assis en position affaissée vers l’avant, ou chez les patients alités en position semi-assise.

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  • L’escarre talonnière : C’est une localisation fréquente chez les patients alités en position dorsale.

C’est la plus facile à guérir, mais aussi celle dont la prévention est la plus aisée (adaptation de la position, soulagement par accessoire).

En revanche, elle contrarie la verticalisation du patient. Elle limite la mobilisation et peut entraîner une perte d’autonomie et une augmentation du niveau du risque d’escarre localisé ailleurs (sacrum par exemple).

 

 

 

 

 

Autres localisations fréquentes

  • L’escarre du trochanter : Elle apparaît principalement chez les patients alités en position latérale.

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  • L’escarre des ischions : Elle est fréquente chez les patients assis, c’est la plus fréquente chez les paraplégiques.

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  • L’escarre due à une sonde urinaire mal fixée ou mal positionnée et qui passe entre le patient et son lit.
  • L’escarre des ailes du nez due à une sonde naso-gastrique ou aux lunettes à oxygène
  • L’escarre de l’occiput: fréquente chez le nourrisson ou en réanimation. Elle peut entraîner une zone de non repousse capillaire.
  • L’escarre de l’oreille due aux lunettes à oxygène.

Échelles de cotation du risque de survenue d’une escarre

  • L’échelle de BRADEN : simple et claire d’utilisation. Echelle recommandée par la HAS (haute autorité de santé)
  • L’échelle de WATERLOW : complexe, destinée à la pratique pluridisciplinaire hospitalière et aux services de chirurgie.
  • L’échelle de NORTON : outil utilisé en ville (évaluation remboursée en ville) ;  ancienne, plus simple mais ne prend pas en compte le statut nutritionnel du patient, validée pour des patients de plus de 65 ans.

Le Score de Braden : C’est l’échelle la plus utilisée en milieu hospitalier.

oncologik.fr
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Classification des stades de l’escarre :

  • STADE I : Rougeur cutanée ou érythème : Il s’agit d’une rougeur persistant à la pression. Contrairement à un érythème inflammatoire qui blanchit sous la pression du doigt, cette escarre reste rouge si on appuie dessus. C’est une rougeur qui persiste après 24 H.
  • STADE II : Phlyctène ou désépidermisation : Perte d’une partie de l’épaisseur de la peau; cette perte touche l’épiderme, le derme ou les deux. L’escarre est superficielle et se présente cliniquement comme une abrasion, une phlyctène ou une ulcération peu profonde.
  • STADE III : Nécrose (plaque noire atteignant toutes les couches tissulaires) : Perte de substance impliquant le tissu sous-cutané avec ou sans décollement périphérique.
  • STADE IV : Ulcération : perte de substance atteignant ou dépassant le fascia et pouvant impliquer :  os, articulations, muscles ou tendons.

Echelle colorielle

Noir = Nécrose

Rouge = Bourgeonnement

Rose = Epidermisation

Jaune = Fibrine

Vert = Infection

Mesures thérapeutiques spécifiques aux différents stades

Principes de nettoyage de la plaie

Le sérum physiologique ou chlorure de sodium à 0,9 % est le produit de référence à utiliser pour le nettoyage des escarres à tous les stades. Il existe un consensus fort pour limiter voire supprimer l’utilisation des antiseptiques en raison du peu de bénéfice qu’ils apportent, comparé à leurs effets négatifs (sélection de souches résistantes, pénétration systémique, toxicité, sensibilisation). Il faut noter que leur utilisation est contre-indiquée avec certains pansements.
La plaie ne doit pas être asséchée.

Traitement de la rougeur

Rechercher et supprimer des points d’appui en utilisant un support ;

Protéger la peau si besoin (urines, macération) par un film semi-perméable ou un hydrocolloïde transparent;

Supprimer les facteurs favorisants (macération, force de cisaillement) ;

Changer régulièrement les positions toutes les 2 à 3 heures.

Traitement de la phlyctène

Réaliser une brèche de taille suffisante avec un bistouri pour évacuer le contenu avec maintien du toit de la phlyctène si possible

Recouvrir par un pansement hydrocolloïde ou un pansement gras afin de maintenir un environnement humide favorable aux conditions de cicatrisation ;

Mettre la phlyctène hors d’appui dans la mesure du possible.

Traitement de la désépidermisation

Mettre un pansement hydrocolloide ou un pansement gras.

Traitement de la nécrose

Ramollir la nécrose : mettre un pansement hydrogel ou pansement à l’alginate imbibé de sérum physiologique recouvert d’un pansement imperméable.

Déterger car les tissus nécrosés retardent la cicatrisation.

Détersion mécanique en excisant la plaque de nécrose avec un bistouri.

Détersion par pansement hydrocolloïde qui permet de ramollir puis décoller la plaie.

Traitement d’une plaie fibrineuse non exsudative

Enlever la fibrine pour faciliter le bourgeonnement avec une curette.

Mettre un pansement hydrogel pour déterger et absorber les débris fibrineux.

Recouvrir d’un pansement hydrocolloïde transparent.

Possibilité d’appliquer directement un pansement hydrocolloïde s’il n’y a pas beaucoup de fibrine.

Traitement d’une plaie fibrineuse exsudative

Enlever la fibrine pour faciliter le bourgeonnement.

Mettre un pansement : Hydrocellulaire si exsudation modéré. A l’alginate de calcium et recouvert d’un pansement absorbant si exsudation abondant.

Traitement d’une plaie bourgeonnante

Mettre un pansement hydrocellulaire dont la mousse absorbe les exsudats et forme un coussinet protecteur.

Traitement d’une plaie hémorragique

Mettre un pansement à l’alginate de calcium pour sa propriété hémostatique.

Traitement d’une plaie infectée

Mettre un pansement à l’argent pour sa propriété bactériostatique et bactéricide.

Traitement d’une plaie malodorante

Mettre un pansement au charbon pour sa propriété d’absorber les odeurs.

Traitement par pression négative (TPN)

Il s’agit d’un procédé non invasif de traitement des plaies chroniques et aiguës par application locale d’une pression négative continue ou discontinue de 100 mmHg en moyenne 24 heures sur 24. Ce système favorise la formation du tissu de granulation et permet la détersion de la plaie par :

  • diminution de l’œdème et des exsudats formés dans la plaie,
  • diminution de la colonisation bactérienne
  • amélioration de la circulation vasculaire et lymphatique et de l’oxygénation locale

Le TPN type V.A.C® est utilisé sur une plaie dont le contenu fibrino-nécrotique a été en partie éliminé pour stimuler le processus de cicatrisation et parfaire le débridement.

Le dispositif est utilisé sur prescription médicale ; la pose et les surveillances du V.A.C sont réalisées par une infirmière formée à son utilisation.

Précautions :

  • Le pansement s’effectue 2 à 3 fois par semaine selon l’état de la plaie et le volume des exsudats.
  • Evaluer la douleur; si nécessaire une antalgie peut être administrée 1h avant le changement de pansement.
  • Stopper l’appareil 1 h avant la réfection du pansement
  • Ne jamais arrêter l’aspiration pendant plus de deux heures par jour car risque de prolifération de germes. Si le problème de fuite ne peut pas être solutionné dans les 2 h : soit enlever la mousse et effectuer un pansement traditionnel, ou la laisser dans la cavité mais dans ce cas, il faut retirer le film polyuréthane et terminer avec des compresses en attendant la prise en charge par une personne compétente.
  • Si présence de signes cliniques d’infection, prévoir un prélèvement bactériologique, et réévaluer la poursuite du protocole.
umvf.univ-nantes.fr

J’espère que vous avez trouvé ce cours intéressant ! N’hésitez pas à le partager ou à me laisser un commentaire !