La chimiothérapie



Buts et principes

Technique médicamenteuse (agents chimiques) utilisée essentiellement dans le traitement des cancers.

Son principe est d’inhiber la croissance tumorale par des médicaments capables d’interférer dans le processus de synthèse cellulaire :

  • Soit par destruction des cellules
  • Soit en empêchant leur reproduction

Ces médicaments sont classés selon leur activité au moment du cycle cellulaire.



Son but peut être :

  • Curatif
  • Adjuvant : se dit d’un traitement qui ne permet pas à lui seul la guérison et qui a pour but de renforcer ou de compléter un traitement spécifique (après)
  • Néo-adjuvant ou initial (avant)
  • Palliatif (visée antalgique)

Ses mécanismes d’action sont :

  • Action par toxicité cellulaire directe ou par inhibition de la réplication (division cellulaire)
  • Action principale sur les cellules à division rapide, y compris les cellules non tumorales (saines, ex : cellules sanguines)
  • Pénétration des cytotoxiques par voie systémique donc dépend de la vascularisation tumorale

Chimio-résistance spontanée de certaines tumeurs ou chimio-résistance spécifique induite.

Aspect légal

En raison de la toxicité des produits, la préparation, la manipulation, l’administration des médicaments, l’élimination des déchets, du matériel contaminé, des excrétas des patients traités sont légiférés.

1. Circulaire n° 666 du 30 janvier 1986 relative à la mise en application des pratiques de bonne dispensation des médicaments en milieu hospitalier :

  • préparation des médicaments
  • locaux spécifiques
  • mesures de protection du manipulateur
  • élimination des déchets.

2. Circulaire n° 678 du 3 mars 1987 : reprise des points de la circulaire précédente afin de les faire respecter.

3. Circulaire N° 381 du 2 mars 1990 relative à la formation continue des IDE participant aux chimiothérapies.

4. Décret no 92.1261 du 3 décembre 1992 relatif à la prévention du risque chimique modifiant le code du travail.



5. Arrêté du 20 décembre 2004 fixant les conditions d’utilisation des anticancéreux injectables (dispensation par les pharmacies hospitalières pour un usage à domicile en dehors d’une HAD après signature de convention)

TOXICITÉS IMMÉDIATES ET RETARDÉES DES

MÉDICAMENTS ANTICANCÉREUX

On peut rencontrer :

  • Des toxicités spécifiques à certaines classes de médicaments
  • Des toxicités non spécifiques, communes à de nombreux médicaments
  • Des toxicités précoces (pendant ou juste après le traitement)
  • Des toxicités retardées ou lointaines.

Les toxicités peuvent être en partie prévenues : adaptation des doses chimio-protecteurs, chimio-correcteurs.

Toxicité des antimitotiques – Prévention et traitements des principaux effets secondaires

1. Toxicité hématologique

Leucopénie, neutropénie
Thrombopénie
Anémie, baisse de la lignée érythrocytaire

⇒Effets secondaires :

A) risque infectieux majeur du à différents agents infectieux ( bactéries, virus, champignons, parasites )

  • infections bactériennes les plus fréquentes : 90%
  • infections mycosiques : candidoses, aspergilloses prédominent
  • infections virales : herpes, CMV
  • infections parasitaires : pneumocystoses

Risque lié à : profondeur et durée de la neutropénie
⇒ Prévention : mesures d’hygiène générales

  • soin buccal
  • soin de cathéter
  • suivi de la NFS
  • observation des signes d’appel
  • ATB à large spectre dés suspicion d’infection

Traitement préventif par facteurs de croissance hématopoiétique :

  • G.CSF ( neupogen, granocyte )
  • GM.CSF ( leucomax )
  • Isolement en chambre stérile

B) Risque d’anémie, risque hémorragique
⇒ prévention/traitement:

  • repérer hématurie, gingivorragie.
  • épistaxis, pétéchies, injection d’érythropoïétine ( Eprex )
  • transfusion de culots globulaires, de concentrés plaquettaires
  • Eviter prise de température rectale, SC, IM

2. Toxicité digestive

A)Nausée,vomissement : potentiel émétisant des anticancéreux varie de très fort à très bas selon le type
Variation de délai et de durée d’apparition
! Existence de vomissement dit d’anticipation.

⇒ Prévention/traitement : fractionner les repas classes pharmaceutiques utilisées :

  • Antihistaminique ( ex : Dramamine )
  • Anticholinergique ( ex : Vagantyl )
  • Neuroleptique (ex : Largatil, Haldol, Primpéran, Plitican )
  • Antidopaminergique ( ex : Motilium )
  • Corticostéroide ( ex : Solumédrol )
  • Antagoniste des récepteurs 5HTZ de la sérotonine ( ex : Zophren’ Kytril )

Utilisation en monothérapie, bithérapie ou associé avec anxiolitique ( Témesta, Tranxene )

B)Diarrhée, constipation, sécheresse buccale

Risque de dénutrition, déshydratation
⇒ Prévention/traitement :

  • peser le patient, surveiller les selles
  • aliments antidiarrhéiques
  • boire 2 L sauf CI

3. Toxicité hépatique
⇒ Prévention : dépister douleur abdominale, diarrhée, prurit, ictère, hyperthermie, réaliser bilan biologique.

4. Toxicité des muqueuses
Mucite
⇒ Prévention/traitement :

  • hygiène buccale,soins de bouche
  • vérification de l’état dentaire avant traitement
  • remise en état de la denture si possible
  • maintien de la salivation
  • traiter la douleur ( gel de lidocaine )

5. Toxicité cardiaque
Signes d’angor ( 5F’U )
Insuffisance cardiaque ( Adriamycine )

⇒ Prévention/traitement : ECG avant début traitement
Toxicité dépend de la dose cumulée dans le temps.

6. Toxicité pulmonaire
Risque de fibrose

⇒ Prévention : dépister insuffisance pulmonaire

7. Déstabilisation de la glycémie
Surveillance ++ si diabétique
! corticoïdes peut entraîner diabète transitoire.

8. Toxicité rénale et urinaire
++ avec cisplatine

⇒ Prévention/traitement :

  • hyperhydratation avant, pdt, après
  • surveillance diurèse, bilan B/S’ PH urinaire
  • surveillance biologique
  • prévenir la patient de possible coloration des urines rouge (Adriamycine), bleu (Noventrone),  jaune(Méthotrexate)
  • modification de l’odeur

9. Toxicité sexuelle et gonadique
Pas d’affectation du désir sexuel
Cycle mensuel perturbé, mycose, stérilité provisoire ou définitive
Grossesse et allaitement C.I
Stérilité provisoire ou définitive

⇒ Prévention : conservation de sperme avant début traitement

10. Toxicité neurologique et musculaire
Engourdissement des membres, picotements visage et extrémités, arthralgies, myalgies, baisse de I’audition

⇒ Prévention/traitement : encourager déplacements lents, traiter douleur, installer confortablement, dépister mouvements anormaux.

11. Toxicité cutanée

Hyper-pigmentation peau, phanères, œdèmes des mains

⇒ Prévention/traitement :

  • éviter exposition au soleil
  • dépister démangeaison, desquamation
  • prévenir dessèchement peau ( biafine )
  • toilette hygiénique recommandée

12. Alopécie
++ avec Alkylants ( Endoxan, Cysplatil, Adriblastine)

⇒ Prévention :

  • casque réfrigéré entraînant vasoconstriction réactionnelle mais efficacité controversée et C.I nombreuses ( méta crânienne, tumeur cérébrale, leucémie)
  • prévenir de la chute des cheveux,cils,poils, repousse différente
  • proposer coupe intermédiaire, perruque ( forfait SS ), bandana

13. Toxicité générale

A) Fatigue, Asthénie du à la pathologie, traitement, anémie, stress, dénutrition, insomnie.

⇒ Prévention :

  • évaluation avec échelle visuelle analogique (douleur, confort de vie)
  • encourager le repos

B) Hyperthermie

⇒ Prévention : contrôle température, dévêtir, baisser température de la pièce, changer de vêtement souvent
faire boire si possible.

C) Allergie
Dyspnée, Hypotension, Oppression

⇒ Prévention : prévenir docteur, préparer corticoïdes, antihistaminiques.

PRINCIPES DE RÉALISATION D’UNE CHIMIOTHÉRAPIE

Elle est prescrite par des médecins formés oncologues ou spécialisés après évaluation du rapport bénéfice-risque.

Des examens cliniques et biologiques du patient sont effectués avant chaque cure :

  • poids
  • indice de performance (0 à 4 = patient asymptomatique, activité normale à confiné au lit, nécessitant une hospitalisation)
  • NFS plaquettes (GB > 3000/mm3, PNN > 1500/mm3, Plaq > 100 000/mm3)
  • absence d’altération de la fonction rénale, hépatique, +/- cardiaque
  • absence d’infection évolutive
  • acceptation psychologique du patient

Elle correspond à des protocoles standards validés respectant doses et rythme.

Elle est préparée en préparation centralisée sous hotte à flux laminaire ou isolateur (pharmacie) avec multiples contrôles, notamment pharmacien.

Elle nécessite un abord veineux correct ( voie centrale, VVP saine ).

Elle est accompagnée de médicaments de confort pour une meilleure tolérance (antiémétiques, anxiolytiques, antiallergiques, antalgiques…).

Elle est administrée par du personnel infirmier formé à la manipulation des médicaments et à l’utilisation des voies centrales.

Les effets secondaires sont prévenus, surveillés, expliqués au patient.

Un médecin spécialisé doit être joignable à tout moment.

ORGANISATION PRATIQUE DE LA CHIMIOTHÉRAPIE

  1. La prescription

Les textes du code de déontologie médicale (article 37) et du code de Santé Publique ont prévu la forme que doit prendre toute prescription médicale.
Entière responsabilité de l’IDE qui doit vérifier la conformité des dites prescriptions.

  • la prescription d’une chimiothérapie est nominative
  • la feuille de prescription comporte des éléments précis
  • Identité du patient, poids et taille (calcul de la surface corporelle), protocole et médicaments utilisés, mode d’administration et traitements associés (antiémétiques, hydratation) ainsi que les éléments biologiques permettant l’administration.

La feuille de prescription doit préciser également le :

  • numéro de la cure. la date et l’heure de I’administration
  • la feuille de prescription doit être datée et signée par le médecin
  • avant de commencer tout traitement prescrit, l’IDE s’assure obligatoirement de l’accord écrit (ex : << feu vert chimio >>, ‹ OK chimio ›) daté, signé du prescripteur (signature identifiable)

La feuille de prescription : lien entre le prescripteur, le personnel préparant et/ou exécutant la prescription et le patient.
Toute modification de la prescription initiale doit faire l’objet d’une nouvelle prescription.

2.   Administration de la chimiothérapie et surveillance lors du traitement

Le rôle infirmier recouvre deux dimensions essentielles lors d’une chimiothérapie :

  • les soins particuliers relatifs à l’administration proprement dite
  • la gestion des effets secondaires d’un tel traitement

a) Avant la chimiothérapie :
⇒ Informer le patient :

  • du déroulement (durée, voie d’administration.. . ..)
  • des effets secondaires qui peuvent se produire (nausées, vomissements, diarrhées, alopécie.. .)

⇒Vérifier le dossier et la présence des examens effectués :

  • NFS, Bilan hépatique, Bilan rénal, ECG et consultation cardio

⇒ Installation confortable du patient…

b) Pendant le traitement :
⇒ S’assurer du respect des traitements adjuvants contre les effets indésirables (casque réfrigérant, anti-émétique s…)

⇒ S’assurer de leur efficacité

⇒ Surveiller le patient :

  • constantes : pouls, tension artérielle, température, diurèse
  • peau (prurit, pétéchies, cavité buccale….)
  • digestif : poids, appétit, vomissements, selles… .
  • neurologiques : paresthésies, douleurs… .
  • Surveillance de la perfusion : dispositif point d’injection…

⇒ Noter sur le dossier de soins toute information : douleurs, vomissements… .

⇒ Informer le médecin dès qu’apparaît un incident, un événement non expliqué

Afin de prévenir des incidents, notamment l’extravasation mais également des accidents rares (choc anaphylactique, réactions allergiques) = Surveillance rapprochée et régulière du patient pendant l’administration.

c) Après le traitement, départ du patient :

Au départ du patient, il convient :

  • de coordonner la suite de la prise en charge : poursuite du traitement, établissement de suite, examens de surveillance….
  • de planifier le prochain séjour (rendez-vous pour examens, consultations et traitements)
  • éducation du patient / effets secondaires, surveillance, mesures de protection /élimination excrétas et entourage…

En cas d’accident

L’accident peut être une réaction allergique massive, une extravasation…
L’IDE doit :

  • Arrêter immédiatement la perfusion.
  • Traiter selon un protocole préalablement défini, validé, signé par le médecin.
  • Prévenir le médecin responsable
  • Documenter l’incident dans le dossier infirmier ( traçabilité)

Le type et l’intensité des effets secondaires varient selon le protocole et les anti-cancéreux utilisés. Ils peuvent être locaux ou généraux.

J’espère que vous avez trouvé ce cours intéressant ! N’hésitez pas à le partager ou à me laisser un commentaire !